Hommage à l’écrivain Alexandre BIYIDI AWALA dit Mongo Beti dit Eza Boto

Mongo Beti – Naissance : 30 juin 1932 – Décès : 07 octobre 2001

Natif d’AKOMETAM, un village près de Mbalmayo à une heure de Yaoundé, Mongo Beti dans les années 50-60 écrivait déjà contre la Françafrique, ce qui lui valut bien des déboires tant pour sa carrière littéraire, que sa trajectoire. Parmi ses écrits les plus célèbres, on peut citer « Main basse sur le Cameroun : Autopsie d’une décolonisation » ou « Ville cruelle ».

Né en  1932 en pleine période coloniale, BIYIDI AWALA fut un témoin de premier plan de la colonisation et les bouleversements induits dans sa société. Il l’a expérimenté et observé, tout comme il a observé et expérimenté la phase de décolonisation. Cette phase porteuse de tant d’espoirs, et pourtant ! Qu’attendre des indépendances souvent négociées bien avant avec l’ancien colon, au détriment des Africains ! Des indépendances où en coulisses, se mettaient ainsi en place les mécanismes devant permettre au colon de rester maître du jeu, sans se faire voir.

Mongo Beti, né vingt-huit ans avant les indépendances, connait donc autant l’avant que l’après. Ce qui explique sans doute l’acuité de son regard sur cette période, son engagement littéraire où à travers les mots, il mettait en lumière les maux d’un Cameroun et d’une Afrique en théorie libre, mais en réalité toujours sous le joug de ce qui sera appelée « Françafrique ». Un système d’oppression d’autant plus complexe et dangereux que son concepteur avait revu ses méthodes, faisant de certains « évolués » africains ses plus fervents défenseurs. C’est d’eux que naîtra cet endocoloniat soumis aux intérêts du colonialisme devenu néocolonialisme.

Parmi les ouvrages de Mongo Beti, fils d’Oscar AWALA et de Régine ALOMO, on peut citer :

Sans haine et sans amour, 1953

Ville cruelle (Eza Boto), 1954

Le Pauvre Christ de Bomba, 1956

Mission terminée, 1957

Main basse sur le Cameroun : autopsie d’une décolonisation, 1972

Remember Ruben, 1974

Peuples noirs, peuples africains, 1978 – 1991

Lettre ouverte aux Camerounais, ou, La deuxième mort de Ruben Um Nyobé, 1986

La France contre l’Afrique : retour au Cameroun, 1993

Trop de soleil tue l’amour, 1999

Branle-bas en noir et blanc, 2000

Le saviez-vous ?

En langue Beti, « Eza Boto » littéralement c’est « Les hommes d’autrui », figurativement, « l’homme d’ailleurs, l’étranger ». Alexandre BIYIDI AWALA, contraint par ses éditeurs d’écrire sous pseudonyme du fait de la censure dont il faisait l’objet, choisira les siens en y mettant déjà de façon symbolique sa ligne d’action. Marié à une Française dont fille de ce colon dont il dénonçait les agissements, n’était-il pas un étranger, celui qui vient remettre en cause ? Installé de nombreuses années en France, n’était-il pas sous une certaine surveillance, voire subtile persécution? Là où certains de sa génération comme les Senghor furent encensés, Mongo Beti, fidèle à son engagement anticolonialiste, vit sa carrière d’écrivain lui valoir bien des déboires. Ce qui arrive souvent aux « Eza Boto », les « étrangers » d’une terre qui leur fait amèrement ressentir ce statut.

Quant à « Mongo Beti », il signifie littéralement « L’enfant Beti », « l’enfant des Beti ». De façon figurative, « Mongo Beti », signifie « l’enfant du village », « l’enfant du terroir ». Un terroir que Mongo Beti aura défendu à sa façon, en dénonçant sans relâche cette « Main basse sur le Cameroun ». Et en commençant par mettre en scène Mbalmayo, ville située à 10 km de son lieu de naissance. À l’époque coloniale, cette ville forestière au climat doux, fut le centre de l’exploitation forestière et de la culture du cacao. Mbalmayo disposait ainsi d’une forte communauté coloniale et commerçante avec des négociants grecs et au sommet, l’establishment colonial français. Une « Ville cruelle » pour les Africains natifs, considérés alors comme des « sujets de l’empire ».

Aujourd’hui, Mbalmayo la ville mise en scène dans le roman « Ville cruelle », a été renommée par ses autorités « Ville de grâce ».

À quelques kilomètres de là, en pleine zone forestière, repose désormais l’un de ses fils les plus illustres.

Puisse la municipalité de Mbalmayo capitaliser de façon plus approfondie et inclusive sur un tel héritage.

En vidéo, quelques images de la descente des festivaliers du FORALY 2024* sur la tombe d’Alexandre BIYIDI.

*Forum International des acteurs de l’industrie du livre de Yaoundé